Les défis de l’industrie du disque

Le professeur en communication Éric Létourneau enseigne à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal. Avec son expertise dans des domaines tels la technologie numérique, il explique comment les artistes doivent toujours s’adapter, peu importe l’époque, pour obtenir du succès.  

Par Charlotte Gaudreault | Arts, lettres et communication

Au cours des années 80-90, quel était le plus grand obstacle auxquels les artistes étaient confrontés pour faire connaître leur musique?

C’était le monopole des majors, des grosses maisons de disque, qui occupaient une partie très importante de l’espace de distribution de disques et qui occupaient aussi, pour des raisons économiques, la plupart de l’espace radiophonique. Les artistes qui avaient signé avec ces majors-là se retrouvaient, s’ils étaient chanceux, à jouer à la radio, puisque dans les années 90, il y avait très peu de place à la radio commerciale. Dans les années 90, plusieurs artistes ont commencé à fonder des labels indépendants, tout en s’assurant de créer des ententes avec des majors qui leur assuraient une distribution. Cela leur a permis de percer à la radio.

 

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L’arrivée de la musique numérique a révolutionné l’industrie musicale, ce qui amène des consommateurs comme Camille Brossard.

 

Quelles sont les causes des baisses de ventes d’albums physiques?

Lorsque le standard MP3 est arrivé, ça a bénéficié de l’engouement d’être une «nouvelle invention». Parallèlement à l’arrivée du MP3, les lecteurs MP3 sont apparus sur le marché. Le lecteur a éliminé le besoin du CD parce que la plupart des gens ne se préoccupent pas trop de la qualité sonore. Le CD lui-même, avec sa petite taille à l’époque, était attrayant parce qu’il était portable, petit et facile à transporter, mais c’est encore beaucoup plus facile de transporter de la musique numérisée dans des petits appareils qui en contiennent énormément. C’est pour ça que le CD a pris autant de recul.

Quelles seraient les solutions pour permettre aux artistes d’obtenir des revenus suffisants?

Une régulation nationale sur les transferts de données sur Internet liées à la musique serait peut-être une solution : il faudrait ainsi que les producteurs obtiennent des redevances. On parle souvent des revenus, mais il faut être apte et souple comme artiste à créer de nouvelles formes de diffusion. Des artistes ont trouvé des nouvelles méthodes pour diffuser leur travail sans passer par les grosses corporations qui donnent très peu de redevances aux artistes. Si l’artiste a sa propre maison de disque, travaille avec son propre producteur et a du succès, il peut s’attendre à faire plus d’argent qu’un artiste qui a fait le même produit, mais qui est distribué par un major. Donc, il faut être inventif.

Comment les artistes sont-ils affectés par la baisse de ventes de CD?

Tous les artistes le sont, parce que c’était quand même le format le plus populaire. Vendre de la musique sur Internet, en général, ce n’est pas très payant. En revanche, tous bénéficient d’une vitrine sur le web et d’une accessibilité pour le grand public. Il est facile, aujourd’hui, d’aller écouter ce que fait un artiste en allant sur Internet pour entendre gratuitement des extraits de leur musique, parfois de l’album entier. C’est un inconvénient pour l’artiste de perdre peut-être une vente d’album, mais si la personne aime vraiment l’album et qu’elle veut une qualité sonore supérieure, elle peut aussi se le procurer.

Les artistes émergents devraient-ils être inquiets face à la baisse de ventes?

Non. Je crois qu’ils devraient la voir comme une opportunité pour créer de nouvelles manières de présenter, de diffuser, de créer et de penser la musique. C’est un beau défi pour les jeunes musiciens. Par exemple, une décision que plusieurs artistes ont prise est de ne plus toucher de droits directement lorsque leur musique est sur Internet, de la laisser complètement libre et gratuite en copyleft. C’est une stratégie qui a permis à plusieurs groupes au Québec de se faire connaître en offrant de la musique gratuitement, puis en présentant cette musique dans un environnement particulier, un site web attrayant et intéressant pour le public, par exemple.

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