Lettre à ma génération qui court partout pour n’aller nulle part. Comme trame de fond, un rythme de vie effréné où règne le toujours plus, plus vite, et mieux que l’autre.
Par Kevin Philibert
Cher iGen,
Tu vas avoir 18 ans cette année où bien tu approches des 20 ans. T’es la première génération née avec un iPad dans les couches et un iPhone dans les mains. Tu fais partie des premiers ados à développer un rapport symbiotique avec un téléphone cellulaire. Cet ami qui partage ta chambre à coucher, ta douche, le repas et Snapchat chaque seconde de ta vie.
LE CRI DU COEUR DE TWENGE
Jean M. Twenge, docteure en psychologie et professeure à l’Université de San Diego aux États-Unis, a publié une longue enquête dans The Atlantic, en parallèle à la sortie récente de son livre Génération Moi: pourquoi aujourd’hui les jeunes Américains sont plus confiants, assertifs – et plus pitoyables qu’avant.
Twenge a observé que le taux de suicide, corélé au nombre d’heures passées devant l’écran, a triplé chez les filles de 12 à 14 ans depuis 2007 aux États-Unis, et il a doublé chez les garçons. Les femmes, selon la psychologue, sont les premières victimes collatérales du nouveau standard de construction de l’ego sur internet.
TU VIS QUOI?
Les études américaines démontrent que ta génération, ma génération, trop collée à son écran, sort moins, conduit peu ou pas d’auto, boit moins et se drogue moins. Bref, les jeunes sont plus en sécurité que jamais, au chaud dans leur cocon virtuel, mais seuls.
Après avoir pris une photo de ton coin de pupitre pour dire à tes «amis» que t’en as plein le cul d’être à l’école ou bien la fameuse photo dans le miroir d’une salle de bain pour laisser paraître un brin de vie sociale, ta vraie story ressemble à quoi ?
C’est tellement facile en 2018 d’être dans le gros rush. Toutefois, ce n’est pas parce que tu n’arrêtes jamais que tu fais nécessairement quelque chose.
Je pense que c’est là que notre génération manque le bateau. Trop concentré sur le numérique et l’impression d’avoir une vie, tu perds ton temps à gagner ta vie plutôt que d’en avoir une. Ce mode de vie là manque de sens.
TA STORY
On m’a souvent dit «tant qu’à faire quelque chose, fais-le donc comme il le faut». Eh bien moi j’ai envie de dire à notre génération que tant qu’à faire quelque chose pour juste faire quelque chose, faisons-le donc pas. Si t’es à l’école juste parce que tes parents t’y obligent, vas-y pas. Si t’as pas d’intérêt pour rien, explore, essaie, grandis et apprends, mais surtout ne reste pas là à rien faire en attendant que le temps s’écoule. On n’est pas né juste pour payer des comptes.
Photo de la une: Philipp Mitterlehner.