Désinformation: problème en croissance au Canada

Neuf Canadiens sur dix avouent avoir été trompés au moins une fois par des fausses nouvelles, selon une enquête mondiale menée par Ipsos en 2019. La désinformation s’immisce maintenant dans le quotidien de chacun. 

Par Valérie Comtois | Arts, lettres et communication

Les réseaux sociaux sont en constante évolution. Le nombre d’utilisateurs augmente chaque jour. N’importe qui peut publier n’importe quoi, n’importe quand. La place du journalisme traditionnel et de l’information de qualité compétitionne avec tout le reste du contenu disponible en ligne. 

Neuf Canadiens sur dix avouent avoir été trompés au moins une fois par des fausses nouvelles selon une enquête mondiale menée par Ipsos en 2019. La désinformation s’immisce maintenant le quotidien de chacun. Logo du Journal de Mourréal. Photo: Journal de Mourréal.

CONTRER LA DÉSINFORMATION
Plusieurs organisations se sont dotées d’une rubrique dans les dernières années pour expliquer pourquoi des rumeurs et des théories répandues sur le Web sont fausses. Une décision pertinente, puisque 90% des Québécois s’informent sur les médias numériques de manière régulière, selon une étude réalisée en 2016 par le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval.

L’Agence Science-Presse entretient le Détecteur de rumeurs et Radio-Canada s’occupe de l’émission et de la rubrique des Décrypteurs. Les journalistes y travaillant se spécialisent dans la lutte contre la désinformation. Le journalisme de fact-checking a ainsi gagné en popularité, sans toutefois obtenir la notoriété des journaux parodiques. 

La journaliste et victime d’une fausse nouvelle du Journal de Mourréal, Anne-Marie Dussault. Photo: Radio-Canada.

JOURNAL DE MOURRÉAL

Nombreux sont ceux qui se rappellent la poursuite en justice du Journal de Mourréal. Québecor a poursuivi la page de parodie, puisque le nom et le contenu du Journal de Mourréal portaient à confusion et portaient atteinte à la marque de commerce du Journal de Montréal. Le Journal de Mourréal a publié périodiquement des articles faux, basés sur des événements d’actualité. 

La nature humoristique des articles a contribué à leur partage en grand nombre. «Dans un sens, il y a un but dans tout ça, d’emmener l’autocritique chez les gens, affirme le cofondateur du Journal de Mourréal et du World News Daily Report, Olivier Legault à Radio-Canada en 2017. On pousse les choses tellement à l’extrême que t’es sensé devenir sceptique un peu». Olivier Legault et son acolyte, Janick Murray-Hall, soutiennent ainsi leur droit à la liberté d’expression et s’en remettent au jugement des gens pour réaliser la fausseté de leurs articles publiés avec une mise en page très semblable à celle des grands quotidiens. 

Cela apporte son lot de désinformation en plus de faire des victimes. «Le Journal de Mourréal a servi d’instrument à propager une information fausse, affligeante, dommageable, et vous ne pouvez pas savoir ce que ça veut dire de se faire décrire dans des comportements sexuels, M. Hall, vous ne savez pas ce que ça veut dire, a affirmé la journaliste et victime d’une fausse nouvelle du Journal de Mourréal, Anne-Marie Dussault, lors du procès. C’est une atteinte profonde et ça persiste encore». 

L’article en question date de 2015 et exprime qu’elle aurait eu une relation intime avec l’ancien ministre de la Santé, Gaétan Barrette. Les conséquences de ces articles montés de toutes pièces perdurent ainsi à travers le temps et ternissent la réputation des victimes dans toutes les sphères de leur vie.

SOLUTIONS

Près de la moitié des Canadiens (46 %) croient que le gouvernement devrait intervenir pour restreindre la propagation de fausses nouvelles, révèle un sondage d’Ipsos de 2019. Plusieurs jugent l’information comme étant un bien public. Une intervention de l’État pour la réglementer serait donc justifiée. «L’argument de la qualité et de la diversité de l’information dans un pays démocratique me semble une très bonne raison pour que l’État s’en mêle, a dit à La Presse le professeur de marketing à HEC Montréal, spécialisé en gestion des arts et de la culture, François Colbert. Pour que la démocratie survive, il faut qu’il y ait des sources d’information crédibles et indépendantes, qui font des enquêtes et des analyses sérieuses.» L’État aurait ainsi une responsabilité à assumer pour contrer la désinformation actuelle et valoriser le journalisme traditionnel. 

Il est toutefois important de ne pas entrer dans la censure. «La régulation est nécessaire, mais si elle est trop restrictive, les citoyens auront le sentiment de vivre dans un régime de censure, affirme au média Le Droit le professeur émérite à l’École de politique appliquée de l’Université de Sherbrooke, Gilles Vandal. Alors des réseaux parallèles verront le jour». Il faudrait donc trouver un moyen de restreindre les publications, sans restreindre la liberté d’expression de chacun. La grande majorité des Canadiens (88%) croit qu’éduquer les gens sur les médias et la désinformation serait la meilleure solution pour éradiquer le problème, selon le sondage mondial d’Ipsos datant de 2019.

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